C'était un jour de vacances.
Août caniculaire au fin fond de l'Aveyron dans les Gorges du Viaur. Notre location, pompeusement appellée "castel", se situait dans un lieu-dit , isolé du monde. Vierge de toutes ondes: pas de radio, pas de télé, pas de téléphone ,rien. Juste le bruit de la riviére en contrebas. Quelques maisons éparpillées de ça de là le long de la berge, agrémentées de jardinets florissants, signes d'une vie tranquille et simple.
Nous étions alors les touristes bienvenus, incongrus : "ceux du château ".
Ceux qui logent au "castel" , une tour médiévale rescapée de pillages anciens.
Ceux du bout de la route, ceux du bout du monde, en fait.
Ceux qui se baignent plutôt dans la piscine que dans la rivière fraîche et vive.
Ceux de la ville qui s'attardent à regarder passer les vaches ruminantes.
Ceux qui se promènent sans but dans un petit hameau de vacances.
Ceux qui se couchent sur la route, chauffée par le soleil, à la nuit noire juste pour compter les étoiles.
Ce jour là donc, la chaleur excessive assommait bêtes et humains dans une torpeur moite. Des gros nuages noirs s'aggloméraient au-dessus du petit hameau. Nous, les filles, avions pour mission de trouver le container à poubelles du coin. Nous voilà parties avec nos seyants sacs noirs sous un soleil de plomb : 100 mètres pour rejoindre le semblant de civilisation existant non loin. En passant devant une ancienne ferme fleurie comme pour un concours de beauté rurale, nous voyons une antique autochtone d'au moins 90 printemps perchée sur deux béquilles.
- Bonjour Madame, lui dis-je la sueur dans les yeux.
- Bonjour, répondit elle, vaguement hésitante, avec son accent du sud à couper au couteau.
- Vous qui êtes du coin Madame, pensez -vous qu'il va pleuvoir? lui demandais je en pointant le ciel bas et noir.
- Ho ma pauvre!! Non, pas de pluie!! Ca va tourner, tourner, et s'en aller!! On a l'habitude vous savez, on sait, nous! dit-elle d'un air supérieur.
- Ha? Eh bien tant mieux.
Nous avons repris le chemin de notre"castel" d'un pas tranquille.
A peine avions nous atteint le porche, qu'un orage soudain d' une violence inouie avec trombes d'eau, éclairs et grondements, s'abattit sur le petit coin perdu.